Tom est fan de Russie, j'avais entendu une interview de Carrère à FI et j'avais trouvé le personnage de Limonov très jamebondesque. J'ai donc acheté le livre écrit par Emmanuel Carrère à Thomas à la dernière rentrée littéraire.
Et puis cet été on fait 8h de voiture, il faut bien choisir quelques romans. Je choisis donc ce Limonov qui a en plus eu le prix Renaudot cette année.
Drôle d'expérience que ce livre :
- ça n'est pas seulement le récit de la vie de Limonov, récit déjà décrit au fil des livres du-dit Limonov. Ce texte a donc un petit côté compile : le meilleur de Limonov, d'autant plus que l'auteur n'a pas cotoyé tant que ça le héros dont il brosse le portrait. Mais l'essentiel n'est pas là, le but de ce livre ne semble en fait pas être le récit de la vie de Limonov.
- ça n'est pas non plus seulement un prétexte pour nous faire revisiter toute l'histoire de Russie, même si cet aspect est très bien traité, on se laisse en effet croire que l'on a compris l'âme russe, qui remplace le rap par la poésie, qui gaspille le gaz offert par le parti, qui boit 3 jours d'affilée, qui a honte de son passé, et encore plus honte d'avoir honte de son passé et rêve de fierté nationale retrouvée...
- c'est surtout une réflexion sur ce qui meut certains hommes, l'auteur ( E. Carrère), Limonov, et tous les anciens enfants lecteurs de livres d'aventure, de livres où des quidams, d'une intelligence supérieure, finissent comme des héros... Le fait est que la plupart de ces anciens enfants comprennent un jour la naïveté de cette envie d'écraser les autres, de se battre pour être le premier, le meilleur, celui que l'on reconnait, et se contentent de ce qu'ils ont et jouissent de leur vie posée, sécurisée au contact de proches, d'une famille, en continuant à rêver d'aventure au côté de ceux qui continuent à courir l'aventure, en quête d'on ne sait quelle reconnaissance, de quelle volonté d'être le premier, le meilleur, le plus reconnu... On retrouve je pense ces caractères parmi ceux qui veulent se distinguer par leur réflexions, par leur qualités physiques, par leur beauté, ou que sais-je, enfin par tous les compétiteurs...
Mais quelle est la meilleure place? Celle qui forge les sportifs de haut niveau, les intellectuels, les carriéristes (sans mauvais jeu de mot), tels Julien Sorel dans le Rouge et le Noir? Ou ceux qui profitent d'une vie simple, sans lauriers ni adrénaline, mais sans stress, sans compétition, tels Candide qui cultive son jardin...?
On retrouve un peu les deux personnages Narcisse et Goldmund qui m'avaient beaucoup fait réfléchir plus jeune. Mais Hesse ne raconte pas la frustration de celui qui veut courir le monde et qui n'y parvient pas, comme Limonov qui végète dans un parti auquel il ne croit pas trop, icône d'une bande de jeunes, maigre consolation des rêves après lesquels il a couru. Pour un héros, combien de vies gâchées par la frustration?
Au final, je trouve qu'il s'agit plutôt d'un livre plutôt sur l'introspection de l'auteur quand il découvre la carrière de Limonov qu'il avait côtoyé lors de ses jeunes années. J'ai trouvé beaucoup de résonances à cette lecture dans ma propre introspection pendant ces 8 heures de clio à traverser la France.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire